L'écrit
est à nouveau au goût du jour.
Les gens lisent et écrivent plus qu'ils
ne l'ont jamais fait. Sur les sites Internet,
dans les mails, sur les écrans des téléphones
portables, nous vivons une recrudescence inattendue
du mot. Nous n'assistons pas simplement à
une soudaine frénésie de velléités
épistolaires, mais bien à la renaissance
du mot et de la manière la plus définitive
de le transmettre : la voie écrite. Qui
l'aurait prédit ?
Nous appartenons
tous, de facto ou presque, à la génération
SMS (Short Message Service, ces messages
que l'on reçoit sur nos téléphones
portables). Des milliards de petits mots sont
échangés quotidiennement grâce
à ce moyen de communication. On préfère
désormais prendre deux minutes pour écrire
un petit message, un billet doux, ou fixer un
rendez-vous, plutôt que de passer deux
secondes à le dire au téléphone,
moyen de communication tellement moderne
mais tellement banal !
Compère
qu'as tu vu ?
Texte de Jean-Pierre Abraham,
illustrations de Vonnick Caroff.
(S. l.), Editions Le temps qu'il fait, (s. d.).
Une rencontre : il écrit. Elle dessine.
Le secret d'âge en âge :
« Ma mère disait : « Ma mère
disait que sa mère disait ».
In « L'il », n° 479 de
mars-avril 1996.
Le
mot est [donc] le nouvel objet à la mode.
En perte de vitesse pendant la seconde moitié
du 20e siècle en grande partie
à cause de l'explosion du téléphone
et de la télévision l'écrit
connaît une résurgence salutaire.
Le téléphone avait porté
un coup aux missives manuscrites acheminées
par la voie postale. Il permettait également
de gommer les imperfections de langage, les
approximations orthographi-ques et grammaticales
de chacun. Le téléphone logeait
tout le monde à la même enseigne,
au même niveau, réduisant ainsi
l'impact des mots.
Mais les mots sont profondément humains.
Dans un monde toujours plus automatisé,
uniformisé, l'écrit permet à
chacun de sortir de la masse, de se distinguer,
de [montrer] ses particularités. Ce retour
en force de l'écrit est sans aucun doute
une bénédiction pour certains,
peut-être un cauchemar pour d'autres.
Mais il est aussi symptomatique de deux besoins
[que l'être humain cherche constamment
à satisfaire] : marquer sa différence
et communiquer.