Dans l'économie nationale des pays industrialisés, le marché du livre est une poussière : moins de 1%. En France, par exemple, les éditeurs ne pèsent pas plus, à eux tous, qu'une entreprise comme Bull... Insignifiant en somme ! Mais, surtout, paradoxal : car sans rapport avec le prestige de la profession et le poids réel du livre dans la vie quotidienne.

Et il n'est pas question ici de bibliophilie, mais de l'édition véhiculée par les grands réseaux de distribution. C'est dire la place qu'occupe le livre artistique dans ce 1% symbolique !

La bibliophilie, superbe conquête de l'inutile, offre pourtant un passionnant défi : plus la barre est placée haut, plus le créateur et l'amateur sont ravis !

Les éditeurs de beaux livres et les sociétés de bibliophiles (bien que leur nombre soit en chute libre depuis la fin des années 1950) tentent néanmoins – aujourd'hui encore – de perpétuer la tradition du livre illustré moderne, tel qu'il a été conçu au début du siècle dernier, mais aussi tel qu'il s'est développé par la suite grâce aux nouvelles technologies.

C'est à ces esthètes, bien déterminés à poursuivre l'aventure au-delà du XXe siècle, que Noces d'encre espère se joindre et apporter sa contribution aux efforts consentis pour que le beau livre conserve sa place.

La création d'un beau livre impose à l'éditeur de maîtriser ou de coordonner une longue chaîne de réalisation, dont les étapes principales sont les suivantes :

• le choix de l'œuvre littéraire ;

• la recherche de l'artiste chargé de l'illustration et celle de l'imprimeur avec lequel il déterminera le ou les moyens de reproduction du texte et des images et décidera de la qualité et du grammage du papier ;

• l'élaboration d'une maquette, ce qui implique la définition de critères de mise en page et, notamment, la sélection d'un caractère et de sa taille ;

• le choix de l'emboîtage dans lequel se rangera le livre.

La recherche de la beauté – une approche qui reste très subjective – revêt pourtant un caractère essentiel, tant aux yeux de l'éditeur de beaux livres qu'à ceux du bibliophile. Le travail et la vocation de Noces d'encre s'inscrivent pourtant dans cette démarche, sans prétention ni fausse modestie.

Beauté du texte et de son illustration. Beauté du contenu donc, mais aussi du contenant. Car le livre lui-même doit se présenter dans une condition parfaite.

Aujourd'hui – sans doute plus que par le passé – le beau livre devient écrin pour une lecture idéale. Cela tient à l'évolution des techniques d'impression : elles sont désormais riches de tous les possibles. Leur variété et leur mixité sont désormais au service des créateurs de livres et propres à satisfaire les multiples goûts littéraires des bibliophiles.

L'impression traditionnelle a été rattrapée par la technologie. Lentement – mais inexorablement – le plomb et la presse à bras ont été remplacés par l'ordinateur et le numérique. Fondamentalement, une technique est-elle toutefois plus noble qu'une autre ? Non : pas plus la typographie que la PAO, pas plus la taille-douce que la xylographie, pas plus la sérigraphie que le cliché.

Chaque technique existe pour elle-même, et peut-être tour à tour requise quand cela s'avère nécessaire ou souhaitable. Il émane d'ailleurs une force singulière de l'usage juste de chaque procédé d'une part, et de leur mixité d'autre part.

En terme de bibliophilie contemporaine, le mélange des techniques traditionnelles et actuelles représente une voie souvent explorée, mais finalement peu osée lorsqu'il s'agit de produire un bel ouvrage.

En vérité, seul compte l'objet fini. Et la qualité du livre achevé ne réside pas seulement dans la technique employée, mais dans l'intelligence (c'est-à-dire la maîtrise) et le souci d'harmonie qui ont permis les pleines et entières expression et exploitation du procédé retenu.