Robert Brasillach
[Sources : François
Ouellet, Robert Brasillach, Association
des Amis de Robert Brasillach et Dossier
Robert Brasillach.]
Né à Perpignan (France) en 1909, Robert Brasillach est
un normalien brillant, mais son homosexualité et ses opinions
politiques choquent. Au milieu des années vingt, il rencontre
Charles Maurras (1868-1952), penseur monarchiste et profondément
conservateur, et devient l'un des principaux journalistes de l'extrême
droite française, dont il propage les idéaux antidémocratiques,
antisémites et pro-nazis. A partir de 1928, il collabore à
la « Revue française », puis à la «
Revue universelle », d'Henri Massis et de Jacques Maritain,
de tendance royaliste, puis il sera encore responsable de la rubrique
Causerie littéraire du journal l'
Action française
(1931-1939).
Robert Brasillach est l'auteur d'essais (Virgile, 1931 ;
Corneille, 1938) et d'une Histoire du cinéma
(1935), en collaboration avec son beau-frère Maurice Bardèche
(1907-1998) qui sera, après la guerre, l'un des premiers
propagateurs des thèses révisionnistes. Il compose
des romans dans lesquels il évoque avec une tendresse mélancolique
la jeunesse et le Paris populaire de l'avant-guerre : L'enfant
de la nuit (1934), Comme le temps passe
(1937),
Les sept couleurs (1939). Avec Henri Massis, un maurassien
qui sera par la suite l'un des proches de Pétain, il écrit
un ouvrage à la gloire des nationalistes espagnols, Cadets
de l'Alcazar (1936). Sa collaboration avec Bardèche débouche
encore sur une Histoire de la guerre d'Espagne (1939).
Il est fait prisonnier en 1940, mais rapidement libéré
en 1941. Rentré en France, Brasillach, toujours opposé
au parti de la guerre (c'est-à-dire : la Résistance),
prône la collaboration ouverte avec les nazis. Il est reçu
par Goebbels, ce qui entraîne sa mise à l'écart
de l'Action française. En outre, Brasillach écrit
des articles d'un antisémitisme virulent, allant jusqu'à
déclarer qu'il faut se séparer des juifs en bloc
et ne pas garder de petits [NDLR : c'est-à-dire d'enfants].
Il se montre également anticommuniste et demande en 1941
l'exécution immédiate des députés communistes,
ainsi que celle de Paul Reynaud et de Georges Mandel.
« J'ai pu me tromper sur des hommes, sur des faits ou
sur des circonstances, mais je n'ai rien à regretter de l'intention
qui m'a fait agir. »
Frappé d'ostracisme au lendemain de la Libération,
Robert Brasillach figure, aux côtés notamment de Louis-Ferdinand
Céline, Pierre Drieu La Rochelle, Jean Giono, Marcel Jouhandeau,
Henry de Montherlant, sur la liste noire de 1944, liste dressée
par le Comité national des écrivains de la Résistance.
Tandis que Céline s'exile au Danemark et que Drieu se suicide,
Brasillach choisit sciemment de se livrer, ce qui à ses yeux
signifie assumer ses positions idéologiques jusqu'au bout,
quitte à le payer de sa vie.
Il est condamné à mort le 19 janvier 1945. Une pétition
militant pour sa libération, signée par une cinquantaine
d'écrivains (au nombre desquels Paul Valéry, Albert
Camus, Marcel Aymé, Paul Claudel, Jean Anouilh, Jean Cocteau),
l'intervention désespérée de François
Mauriac, qui va jusqu'à obtenir un entretien privé
avec de Gaulle, ne changeront rien.
Robert Brasillach est l'un des esprits les plus brillants de
sa génération... Ainsi commence le plaidoyer de
Mauriac en faveur de Brasillach, lu à l'audience du procès.
L'engagement de Mauriac en faveur de Brasillach est d'autant plus
remarquable que celui-ci ne l'a jamais ménagé dans
ses articles. Il n'a du reste jamais ménagé personne
; particulièrement agressif à l'endroit des communistes,
il va jusqu'à se mettre à dos, durant l'Occupation,
ses anciens collègues de « Je suis partout »,
revue de droite dont il assume la direction de juillet 1937 à
août 1943.
Robert Brasillach a 35 ans lorsqu'il est fusillé le 6 février
1945. Le général de Gaulle déclare après
son exécution : la justice n'exigeait peut-être
pas la mort de Brasillach, mais le salut de l'État l'exigeait.
Brasillach a évoqué ses derniers jours dans Poèmes
de Fresnes (publiés en 1949).
L'uvre de Robert Brasillach est imposante. S'il faut identifier
les thèmes à partir desquels la fiction prend forme
chez Brasillach, ce serait certainement le temps et le rêve.
Toute l'uvre exprime la hantise du temps qui s'écoule
et la difficulté de passer de l'enfance au monde adulte,
de l'univers du rêve et du jeu à celui de la maturité
et de la responsabilité des actes posés. Mais n'est-ce
pas là la difficulté de passer de la littérature
à la politique ?