Sing-Sing ou la maison des trois marches
Nouvelle

  • Rédaction
    Hôtel « La Michaudière » (Château de Guigneville), Guigneville-sur-Essonne (Seine-et-Oise, aujourd'hui Essonne, France), en mars 1931 [ ? ].


  • Manuscrit
    [ ? ].


  • Publication d'une préoriginale
    Dans l'hebdomadaire « Vu » n° 158 du 25 mars 1931 ; illustration (photo) de Germaine Krull.


     


      Sing-Sing ou la maison des trois marches, 1931.
    Publication en préoriginale.


  • Edition originale (publication posthume)
    In
    Tout Simenon (Paris, Presses de la Cité, 1991) - tome 18.
    Sing-Sing ou la maison des trois marches est l'un des six textes recueillis sous le titre Nouvelles introuvables, 1931-1934.


  • Réédition(s) en français
    Aucune.


  • Edition(s) collective(s) en français

    In Tout Simenon (Paris, Omnibus, 2002-2004) - tome 18.


  • Traduction(s)
    Liste non exhaustive

    En allemand :
    [ ? ] : [ ? ].

    En anglais :
    [ ? ] : [ ? ] (première édition américaine).
    [ ? ] : [ ? ] (première édition anglaise).

    En italien :
    [ ? ] : [ ? ].


  • Intrigue
    Vers neuf heures du soir, dans une ville française non nommée par l'auteur, un homme sort du Café de la Marine et se laisse happer par la bourrasque, en maintenant son chapeau sur la tête. Il lutte comiquement contre le vent, puis aperçoit les lumières de Chez Emile, où il y a un bal. Afin d'éviter les silhouettes qui rôdent autour du bouge, l'homme change de trottoir. Puis il se réfugie dans l'encoignure d'une porte pour allumer sa pipe.

    Les quais sont déserts. En faction près du chalutier Francette, un douanier suit l'inconnu des yeux. Il croit entendre le bruit d'une détonation. Aussitôt après, l'homme qui avait vainement frotté vingt allumettes dégringole des trois marches de pierres donnant accès à la porte d'une maison dont aucune lumière ne filtre.

    L'homme est maintenant étalé au milieu de la rue, éclairé en plein par un réverbère. Son pardessus est troué, brûlé à la hauteur de l'abdomen. On le reconnaît, c'est Bouchardeau, le négociants en vins qui habite quelques maisons plus loin. Un médecin le fait transporter chez lui pour le soigner et la police établit que le coup de feu a été tiré à travers la boîte aux lettres.

    Comme il n'y a pas eu mort d'homme, Emile juge que la musique peut reprendre et reprend sa place derrière son comptoir. Il grimace en voyant entrer Sing-Sing, le rat de quai (c'est-à-dire un homme qui donne un coup de main par-ci et un autre par-là, qu'il fait aussi visiter le port aux touristes), qui s'accoude au zinc et commande un grog. Il est maigre et roux, avec un barbe d'un centimètre, un vieux complet trop étroit, des souliers aux talons retournés et une casquette à visière cassée. Il n'y a pas si longtemps, il avait son bateau à lui, un dundee de cent-vingt tonneaux. Mais il y a eu des problèmes, avec la police, à New-York. Trafic d'opium. Il a fait quatre ans de dur ! C'est pour ça qu'on l'appelle Sing-Sing… Le nom de la prison, paraît-il…

    Emile n'aime pas trop que Sing-Sing fréquente son bistro. Sa présence perturbe Fanny, la fille de salle. En plus, le douanier l'a vu tout à l'heure se mêler aux curieux qui tournaient autour du corps de Bouchardeau…

    Après être sorti de Chez Emile, Sing-Sing passe la nuit à rôder autour du Grand Hôtel, en face de la gare. Il y entre à huit heures et commande un café arrosé. Il attend que sorte le client de la chambre 15, Joseph Leduc (trentre-cinq ans), le nouveau percepteur des postes. Lorsqu'il descend l'escalier, celui-ci aperçoit Sing-Sing, fait marche arrière et demande qu'on lui serve le déjeuner en haut. Le soir, Leduc et Sing-Sing n'ont pas bougé. A minuit, cependant, ce dernier quitte le Grand Hôtel et se rend Chez Emile. Là, il appelle Fanny et lui montre une photographie. La fille de salle détourne la tête et, l'appelant par son prénom — Pierre — le supplie de la laisser, parce qu'elle n'en peut plus…

    Le lendemain matin, Sing-Sing retourne au Grand Hôtel et attend à nouveau Leduc. Lorsque celui-ci se risque enfin hors de l'établissement, Sing-Sing le prend en chasse ; tantôt il le suit, tantôt lui fait face et l'oblige à tourner dans un sens ou dans un autre. En réalité, Sing-Sing dirige Leduc jusque Chez Emile et, une fois devant la porte du bistrot, l'oblige à y entrer.

    Le postier est terrorisé et s'affale sur un banc. Lorsqu'on lui demande ce qu'il veut boire, il esquisse un geste d'indifférence, mais constate que Sing-Sing lui barre la sortie. L'ancien bagnard appelle alors Fanny, qui est effrayée par la tournure des événements. Emile, les sourcils froncés, se tient prêt à intervenir.

    Sing-Sing sort une photographie de sa poche. On y voit son portrait, le jour du baptême de son bateau, qu'il avait appelé le Fanny. Il avait alors vingt-six et était parvenu à se payer un joli dundee, pour lequel la banque avait avancé les trois-quarts des fonds. Pendant toute une année, le cabotage n'a rien donné. C'est alors qu'un Américain lui a proposé une affaire… Un trafic pas très régulier, mais qui lui aurait permis de rembourser la banque d'un coup, d'épouser Fanny et d'acheter cette petite maison dont ils rêvaient tous les deux…

    Le coup a mal tourné, parce que ce blanc-bec de Leduc, qui faisait la cour à Fanny, a eu vent de l'affaire et à dénoncé Sing-Sing aux douaniers américains. Quatre ans de prisons, pendant lesquels Fanny devient momentanément la maîtresse de Leduc, puis simple fille de salle Chez Emile… Quelle dégringolade !

    Le soir où on tire sur Bouchardeau, c'est Sing-Sing qui était visé. Leduc lui avait donné rendez-vous dans cette maison inhabitée afin de le supprimer et de vivre tranquillement sa nomination de receveur des postes !

    Leduc se tait. Sing-Sing sait que s'il le dénonce à la police, on ne le croira pas, lui, l'ancien taulard. Alors, ses affaires, il entend les régler lui-même. D'un geste brusque, il tire quelque chose de sa poche. Il y a soudain un reflet de métal au bout de son bras. Emile se lève d'un bond… Fanny pousse un cri strident… Une détonation retentit…

    C'est Leduc, les yeux fous, qui a tiré. Sing-Sing porte une main sur son flanc et jette sur le comptoir le revolver d'enfant, acheté au bazar, qu'il avait brandi. Son regard va à Leduc :

    — C'est fait !… Il y a des témoins, pas vrai ?… Prison pour prison !

    Sing-Sing essuie à son veston ses doigts tachés de sang, vide son verre, puis demande à Emile de veiller sur Leduc et à Fanny d'aller chercher un agent. Après, il sort du bistro et s'éloigne en direction du port.

    On le retrouvera deux heures plus tard, dormant à poings fermés dans la soupente que lui loue un brocanteur. Il faudra l'emmener de force à l'hôpital pour lui extraire la balle qu'il prétendait garder entre deux côtes, comme souvenir.


  • Sources
    Ouvrages
    consultés et informations relatives aux recherches bibliographiques.


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