Sujet
[Source : Mathieu Rutten in Simenon (Nandrin,
Eugène Wahle, 1986).]
Dans
A l'abri de notre arbre, Simenon insiste surtout sur le
fait qu'il faut avant tout rester vrai, qu'il faut dicter à
l'état brut, dresser indirectement le bilan de sa vie, non
pas à la manière d'un chef comptable, mais comme un
simple mortel : « Je ne veux pas dicter le meilleur de moi-même,
mais le moi-même entier, avec son bon et son mauvais côté,
ses faiblesses et ses défaillances, y compris souvent, je m'en
rends compte, les faiblesses grammaticales ».
De plus, « la sincérité n'est jamais complètement
acquise. Elle se crée et se recrée à la force
du poignet ».
Voilà qui est clair et net. Par ailleurs, ces faiblesses et
déficiences remontent à l'enfance. Il n'a, en effet,
nul besoin d'exemples de « Mémoires » traditionnels,
comme ceux de César, de Chateaubriand, de Montaigne, de Sully
et d'autres pour savoir ce qu'il veut, et atteindre à la
sérénité.
Simenon veut que ses
Dictées
soient des
documents humains, tels les écrits de Brantôme,
de Dostoïevski, de Saint-Simon et d'autres, qui n'ont, dès
son enfance, cessé de le fasciner. Dès lors, dit-il
: « On dirait que ma vie intérieure est devenue plus
unie, en même temps que plus imprévisible
Il faut
se sentir vide de tout souci, en effet, personnel ou impersonnel,
pour être prêt, à n'importe quel moment de la journée,
à capter et à absorber la vie du dehors, et ce que je
risque à appeler la vie universelle ».