Intrigue
Francine Josselin (cinquante-et-un ans) et sa fille Véronique
(vingt ans) sont au théâtre, tandis que leurs conjoints
respectifs passent la soirée ensemble, dans l'appartement des
Josselin (quartier de Montmartre, Paris, France).
René Josselin (environ soixante-cinq ans) est homme d'affaires
retraité. Il a été directeur de cartonnerie.
Son gendre, Paul Fabre est un pédiatre dévoué
à l'excès à ses patients. Alors que les deux
hommes devisent tranquillement, le médecin reçoit un
coup de fil : il est appelé d'urgence auprès d'un enfant
malade, qu'il ne trouvera jamais. L'adresse qu'on lui a donnée
est fausse. On a simplement voulu l'éloigner de son beau-père.
Et lorsque les deux femmes rentrent du théâtre, elles
trouvent René Josselin étendu dans son salon : il a
été tué par deux balles de revoler, un automatique
6,35 appartenant à la victime elle-même.
René Josselin était un homme apprécié,
auquel on ne connaît pas d'ennemi. D'ailleurs, la famille Josselin
ne se compose que de
braves gens qui n'ont rien à se
reprocher. Et tous possèdent un alibi. Certes, celui du docteur
Fabre est le plus fragile, mais rien ne laisse supposer qu'il puisse
être l'assassin.
Dès le début de son enquête, Maigret est guidé
par deux sentiments. Le premier le conduit à penser que l'auteur
du crime est un proche de la famille ; le second, que la famille elle-même
a deviné qui est le meurtrier et que, par bonté de cur,
elle ne livre pas le nom du coupable.
C'est avec difficulté que le commissaire recueille des informations
susceptibles de le mener sur une piste concrète. Dans ce milieu
bourgeois, composé de gens d'une honnêteté irréprochable
et que rien ne prédisposait à vivre un tel drame, on
se montre aimable avec lui, mais on se tait.
La découverte d'une chambre de bonne, d'habitude inutilisée
mais dans laquelle, visiblement, un inconnu vient de séjourner
au sixième étage de l'immeuble dans lequel habitent
les Josselin, va relancer les affaires de Maigret. Ce d'autant plus
que la clef qui sert à ouvrir la porte de cette chambre se
trouve normalement pendue à un clou, dans la cuisine des Josselin.
L'assassin connaissait donc à la fois l'emplacement du revolver
de René Josselin et celui de la clef qui lui permettrait de
passer tranquillement la nuit dans une chambre de bonne, sans avoir
à entrer ni à sortir de l'immeuble entre 22 heures 15
et 23 heures, soit le moment durant lequel Josselin a été
tué.
Muni d'une photo de René Josselin, Maigret enquête de
café en café. Il finit par tomber sur un garçon
qui reconnaît Josselin et affirme l'avoir vu récemment
en compagnie d'un homme d'une quarantaine d'années. D'autres
témoignages lui permettent d'établir que René
et Francine Josselin ont rencontré séparément
ce même homme qui a été vu, pendant la journée
précédant le crime.
Presque à contrecur, Maigret pousse Francine Josselin
dans ses derniers retranchements. Et la veuve finit par avouer que
l'inconnu avec lequel René et elle se sont entretenus n'est
autre que son frère cadet, Philippe de Lancieux.
Philippe ne s'est jamais remis d'une enfance difficile. Orphelin de
mère, rejeté par un père alcoolique et renvoyé
de tous les établissements scolaires qu'il a fréquentés,
il a mené une vie complètement dissolue. Il soutirait
de l'argent à sa sur et à son beau-frère,
trop indulgents à son égard, depuis le début
de leur mariage.
Homme désaxé, devenu mythomane, Philippe de Lancieux
réclamait des sommes toujours plus importantes. S'il a abattu
René Josselin, c'est sans doute que celui-ci avait décidé
de mettre fin à ses largesses.
Francine Josselin, ne veut rien entendre des raisons qui ont poussé
son frère à tuer l'homme qu'elle aimait. Jusqu'au bout,
elle a cherché à le protéger en se taisant. Pour
lui laisser le temps de s'enfuir. Parce qu'elle se sent responsable
des fautes commises par son frère. Parce qu'elle s'est toujours
sentie coupable de ne pas lui avoir consacré sa vie tout entière.
Son mariage n'est, d'ailleurs, à ses yeux qu'une façon
d'avoir trahi son frère.
Maigret lancera un mandat d'arrêt contre Philipe de Lancieux.
Il sera retrouvé six mois plus tard, transpercé de nombreux
coups de couteau, sans doute victime d'un règlement de comptes
dans le Milieu.