Intrigue
Si deux demi-échecs font un échec, alors le compte y
est.
Tout d'abord, il y a
l'histoire de la disparition de l'Anglaise.
Une enquête qui ennuie Maigret et dont il ne s'occupera que
distraitement. D'une caravane de quarante touristes venus de Londres
pour visiter Paris (France), une veuve, mûre, mais encore comestible,
disparaît une belle nuit. Scotland Yard, trouvant trop lentes
et inefficaces les méthodes de recherche de la police parisienne,
envoie à la rescousse l'inspecteur Pyke. Sa venue humilie et
agace le commissaire, bien qu'il soit un ami, et le fait qu'il ne
découvre rien ne suffit pas à réconforter les
inspecteurs et collaborateurs habituels de Maigret. Eux et lui sont
à bout de nerfs, à cause des faux tuyaux quotidiens
on l'a vue ici
on la signale là
comme il y en a toujours dans ces affaires, à cause des commentaires
narquois de la presse française, à cause des planques
innombrables autant qu'inutiles qui se succèdent
Ensuite, il y a la visite de Fumal au Quai des Orfèvres, le
siège de la P. J. parisienne. Le roi de la boucherie parisienne,
homme d'affaires de grande envergure, demande la protection de la
police, en raison de son importance financière et politique.
Il se plaint de recevoir des lettres anonymes menaçantes. Maigret,
qui a connu Ferdinand Fumal dans son enfance, le trouve toujours aussi
antipathique et s'occupe de lui à contrecur. Ce d'autant
plus que Louise Bourges, la secrétaire de Fumal, complique
la tâche du commissaire en lui affirmant que son patron s'adresse
lui-même ces menaces !
Bien que sa maison ait été surveillée, Fumal
est découvert assassiné le lendemain matin dans son
bureau. Les premiers interrogatoires conduits dans l'entourage de
la victime laissent supposer que Fumal était universellement
détesté. Il a acculé son beau-père au
suicide, en le ruinant. Il fait de son beau-frère un clochard
et de sa femme une alcoolique. Il a gravement humilié sa secrétaire.
Son plaisir consistait à ruiner les autres pour affirmer sa
puissance. Autour de lui, Fumal n'a fait qu'accumuler haine et rancur.
Sa méchanceté foncière et gratuite, son pouvoir
tyrannique sur ses proches, ses subalternes et ses concurrents font
que chacun avait un motif de le voir disparaître et que tous
sont satisfaits de sa mort. Sauf Martine Guilloux, sa maîtresse,
pour laquelle il représentait la sécurité. C'est
la seule personne avec laquelle il se montrait moins inhumain. Devant
elle, il pouvait à la fois parader et se plaindre.
Au cours de son enquête, Maigret comprend aussi que Fumal était
plus ou moins berné par tous ceux qu'il croyait dominer. Sa
femme recevait son frère en cachette. Sa secrétaire
transmettait des renseignements financiers confidentiels contre de
l'argent. Son bras droit, Joseph Goldman, lui a dérobé
des sommes importantes. Son valet de chambre, Victor Ricou, qu'il
avait sauvé de la prison pour en faire un serviteur à
sa merci, le détestait particulièrement parce qu'il
l'avait asservi.
C'est la configuration des lieux, boulevard de Courcelles, où
travaille et habite Fumal, qui va enfin guider Maigret sur une la
bonne piste. Le bureau de Fumal est effet bien visible depuis la chambre
de Louise Bourges, située au-dessus des anciennes écuries.
Le commissaire en acquiert la conviction que celle-ci sait tout.
Louise Bourges sait, mais sans avoir rien vu. Effectivement, elle
a surpris à plusieurs reprises Victor Ricou en train de rôder
autour de la maison, à pas de loup, comme un braconnier. Elle
dit à Ricou de fuir au plus vite, juste avant que Maigret découvre
la vérité.
Car c'est bien le valet de chambre qui a tué Fumal et emporté
le contenu du coffre-fort afin de recouvrer la liberté. Maigret
n'a pas été assez rapide dans ses déductions
et le coupable a pu s'enfuir
suivant à la lettre le conseil
donné par Louise Bourges.
Victor Ricou aboutit au Panama. Ce n'est que cinq ans plus tard qu'on
le retrouvera par hasard à Paris où il est revenu pour
mourir. La maladie l'empêchera d'être jugé aux
Assises. Maigret n'en veut pas à Ricou de lui avoir échappé.
Fumal, en plus de son caractère vil et méprisable, avait
fait par ailleurs main basse sur le château de Saint-Fiacre
et toute ses dépendances
ce qui ne pouvait laisser le
commissaire indifférent !
Quant à la vieille Anglaise, on apprendra qu'elle vit désormais
tranquillement en Australie