Nicolas
Nouvelle

Les enquêtes du juge Froget ; [09]

  • Rédaction
    A bord de l'Ostrogoth, Stavoren (Pays-Bas), durant l'hiver 1929-1930.
    Selon les archives secrétariales et le livre de comptes de Simenon : durant hiver 1930-1931.


  • Manuscrit
    [ ? ].


  • Publication d'une préoriginale
    Dans l'hebdomadaire « Détective », n° 80 (énigme) et 82 (dénouement) des 8 et 22 mai 1930 (soit 2 livraisons), sous le pseudonyme de Georges Sim.


     



    Nicolas, 1930.
    Publication en préoriginale.



  • Edition originale
    In Les 13 coupables (Paris, A. Fayard, 1932).
    L'ouvrage est publié sous le patronyme de l'auteur.


  • Réédition(s) en français

    [En préparation].


  • Edition(s) collective(s) en français
    Liste non exhaustive

    In Œuvres complètes (Lausanne, Editions Rencontre, 1967-1973) - tome VI.
    In Tout Simenon (Paris, Presses de la Cité, 1988-1993) - tome 17.
    In Tout Simenon (Paris, Omnibus, 2002-2004) - tome 17.


  • Traduction(s)
    Liste non exhaustive

    En allemand :
    [ ? ] : [ ? ].

    En anglais :
    [ ? ] : [ ? ] (première édition américaine).
    [ ? ] : [ ? ] (première édition anglaise).

    En italien :
    [ ? ] : [ ? ].


  • Remarque(s)
    Nicolas est le neuvième volet d'une série de treize nouvelles qui font l'objet d'un concours hebdomadaire, primé en espèces. Chaque nouvelle s'étend sur deux numéros : dans le premier sont posés tous les éléments de l'énigme ; dans le second, en quelques lignes, est donné son dénouement.

    Il existe une autre nouvelle intitulée Nicolas, dont la trame est totalement différente de celle qui est décrite ici. Elle a été publiée pour la première fois, sous le patronyme de l'auteur, dans « La Revue de Paris », en mars 1945, sous le titre L'homme à barbe.

    Elle a ensuite été reprise dans Tournants dangereux, un recueil de nouvelles publié aux U.S.A. (New York, Appleton-Century-Crofts, edited by Otis Fellows, Columbia University), sous le titre Nicolas. Puis dans Le bateau d'Emile (Gallimard, N.R.F., 1954), sous son titre original, L'homme à barbe). Puis dans La rue aux trois poussins (Paris, Presses de la Cité, 1963), à nouveau sous le titre Nicolas.


  • Intrigue
    Russe des pieds à la tête et jusqu'au bout des ongles ; avec, parfois, fugitifs, des airs de grand seigneur ; une aisance d'homme du monde, à peine teintée d'une pointe imperceptible d'humilité. Nicolas porte un smoking. Il a une cinquantaine d'années ; mais, rasé de près, le teint frais, l'œil assez clair, il garde un air allègre. Sans être gros, il a un certain embonpoint qui lui donne, encore qu'en très distingué, une silhouette de bon vivant. Son sourire trahit l'indulgence de ceux qui ont beaucoup vécu et qui n'espèrent plus grand-chose.

    Nicolas pousse la porte du Picratt's (Paris, France) et précède le juge d'instruction Froget dans l'agitation du cabaret, en frôlant des femmes peu vêtues, au rire pointu, et des garçons obséquieux. Les deux hommes montent au premier étage, dans un salon particulier.

    C'est dans ce salon que, la veille, un Américain de passage, William Haynes prétend avoir été agressé par Nicolas, pour lui dérober son portefeuille. Haynes a été frappé à la tête au moyen d'une bouteille de champagne : une plaie de dix centimètres l'obligera probablement à porter une perruque. Pour l'instant, il est à l'hôpital et devra garder la chambre deux semaines encore.

    L'Américain possède une usine de pneumatiques à Oakland et est millionnaire. Il a été recommandé à Nicolas par un compatriote, Assatourof. Haynes attend de Nicolas qu'il l'accompagne la nuit à travers Paris. Pour ce faire, il lui remet trois mille francs pour couvrir les menus frais de la soirée.

    Après avoir dîné, les deux fêtards se rendent au music-hall, puis dans un cabaret. Haynes proclame à haute voix que l'endroit est lugubre et qu'il veut des femmes. Nicolas l'emmène dans une brasserie de la rue Montaigne et lui présente deux amies. La tournée se poursuit donc à quatre, mais les trois établissements dans lesquels ils entrent tour à tour ne plaisent pas à Haynes. Dans l'un de ceux-ci, où Nicolas est très connu et compte plusieurs amis dans l'orchestre de balalaïkas, il évite de justesse le scandale lorsque Haynes interrompt la mélodie et réclame du jazz…

    Pour éviter tout problème ultérieur, Nicolas conduit le petit groupe dans un salon privé du Picratt's. Là les deux femmes se dirigent vers les lavabos. Nicolas et Haynes restent seuls un moment. Fracas de verre cassé et gémissements. Haynes perd du sang en abondance. L'Américain, qui n'a plus son portefeuille en poche, accuse Nicolas de l'avoir attaqué pour le voler. Intervenue rapidement, la police n'a pas trouvé Nicolas en possession du portefeuille. De toute évidence, il ne l'a pas non plus caché dans la pièce, ni glissé discrètement à l'une de ses amies ou à un garçon de l'établissement.

    — Je n'ai pas volé, se défend Nicolas avec véhémence et un petit tremblement des commissures des lèvres.

    Oui, il a cassé une bouteille de champagne sur la tête de l'Américain parce que celui-ci l'excédait et le traitait comme un vulgaire larbin, ramenant sans cesse sa fortune et sa réussite dans ses insultes.

    — J'ai frappé, mais je n'ai pas volé.

    Froget l'inculpe de coups et blessures. C'est tout. Les deux hommes sortent du Picratt's. Froget demande alors à Nicolas quelle insulte Haynes lui a-t-il assénée pour qu'il perde ainsi ses nerfs. Alors qu'ils avaient bu huit bouteilles de champagne, Nicolas a voulu laisser cent francs de pourboire au garçon. Haynes a repris le billet des mains du serveur et la rendu à Nicolas en lui demandant de n'en donner que la moitié.

    Nicolas lui annonce alors qu'il le quitte et que, pour lui, la soirée s'arrête là. Il lui conseille cependant de remettre cinq cents francs à leurs deux compagnes. Haynes a ri, prétendant que cinq dollars étaient plus que suffisants. Nicolas a insisté… Il peine à dire la suite. Alors Froget poursuit à sa place :

    — L'Américain vous a soupçonné de défendre votre pourcentage ! Il a peut-être même déclaré que les deux femmes travaillaient pour vous. C'est à ce moment là que vous l'avez frappé. Si vous avez eu la tentation de lui prendre son portefeuille, vous n'avez pas pu le faire, parce que Haynes ne l'avait plus sur lui. Mais votre agression lui a donné l'idée d'une vengeance : vous faire condamner pour vol et tentative d'assassinat. Ce qui transportait l'affaire sur un autre plan…

    Le juge salue Nicolas d'un brusque coup de chapeau, monte dans une voiture de police, le laissant — déconcerté — au milieu du trottoir. A trois heures du matin, avant de se coucher, Froget note dans son calepin : insulte au cours de la discussion à propos des femmes ; coups ; tentative de vol.



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