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Rédaction
Bradenton Beach (Floride, U.S.A.), en mars 1947.
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Manuscrit
[ ? ].
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Publication d'une préoriginale
Aucune.
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Edition originale
In Maigret
et les petits cochons sans queue (Paris, Presses de la
Cité, 1950).
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Réédition(s)
en français
Liste non exhaustive
Nouvelle recueillie en volume in La douzaine du diable, Paris,
Editions de la première chance, Jourdain Conil, 1953 ; Collection
de la Tour Pointue).
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La douzaine
du diable, 1953.
Contient une réédition de la nouvelle
Le petit tailleur et le chapelier. |
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Edition(s) collective(s)
en français
Liste non exhaustive
In uvres
complète (Lausanne, Editions Rencontre, 1967-1973)
- tome 25 (on trouve les deux versions Bénis
soient les humbles et Le petit tailleur et le chapelier).
In Tout
Simenon (Paris, Presses de la Cité, 1988-1993)
- tome 4 (on ne trouve que la version Le petit tailleur et le chapelier).
In Tout
Simenon (Paris, Omnibus, 2002-2004) - tome
4 (on ne trouve que la version Le petit tailleur et le chapelier).
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Traduction(s)
Liste non exhaustive
En allemand :
[ ? ] : [ ? ].
En anglais :
[ ? ] : [ ? ] (première édition américaine).
[ ? ] : [ ? ] (première édition anglaise).
En italien :
[ ? ] : [ ? ].
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Remarque(s)
Le petit tailleur et le chapelier est une nouvelle dont la
trajectoire éditoriale mérite quelques précisions.
Il existe une seconde version, écrite à la fin de l'année
1948 [ ? ] et intitulée Bénis
soient les humbles. C'est le dénouement de l'intrigue
qui différencie les deux versions.
La seconde version est publiée pour la première fois
en anglais sous le titre Blessed are the Meek (en avril 1949)
dans la revue américaine « Ellery Queen's Mystery Magazine
». Elle vaut à Simenon de remporter le premier prix (2'000
dollars) du 4ème concours de la nouvelle policière organisé
par l'éditeur prix Ellery Queen.
Bénis
soient les humbles la version française
de Blessed are the Meek est publiée un mois plus
tard, en mai 1949, dans la revue « Mystère Magazine »
(Paris, Editions Opta).
Quant à la première version, sous le titre Le petit
tailleur et le chapelier, elle ne sera publiée pour la
première fois qu'en 1950 dans le recueil Maigret
et les petits cochons sans queue (Paris, Presses de la
Cité).
Dans La douzaine du diable (1953), Igor B. Maslowski présente
sous le titre Bénis
soient les humbles ou Le petit tailleur et le chapelier
les deux versions de ces nouvelles. L'essentiel du texte (page
15 à 47, soit les trois premiers chapitres) correspond à
la partie commune aux deux versions. De la page 47 à 53, on
trouve le dénouement tel qu'il fut publié pour la première
fois sous le titre Blessed are the Meek. De la page 54 à
58, on trouve le dénouement tel qu'il figure dans la version
Le petit tailleur et le chapelier écrite en mars 1947.
C'est donc le quatrième et dernier chapitre qui a été
modifié d'une version à l'autre.
En décembre 1948, sur la base des deux nouvelles Le
petit tailleur et le chapelier et Bénis
soient les humbles Simenon écrit Les
fantômes du chapelier. Le roman est publié
en avril 1949 (Paris, Presses de la Cité) et développe
la même intrigue, imaginant pour le dénouement
de celle-ci une troisième alternative.
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Intrigue
[NDLR : chapitres 1 à 3, soit la partie de
l'intrigue commune aux deux nouvelles, Le petit tailleur et le
chapelier et Bénis soient les humbles.]
Une ville française de la Loire (dont le nom n'est pas mentionné).
On est en novembre. Depuis quinze jours, il pleut du matin au soir
et fait nuit dès trois heures et demie de l'après-midi.
Kachoudas, le petit tailleur de la rue des Prémontrés
a peur. Comme les dix mille autres habitants de la ville. Il travaille
à l'entresol, juste au-dessus de sa boutique. En face de chez
lui, à moins de huit mètres, se trouve la chapellerie
de M. Labbé.
Comme chaque soir, vers cinq heures, le chapelier quitte son commerce
et se rend au Café de la paix prendre l'apéritif
et jouer aux cartes avec quelques habitués. Et chaque soir,
Kachoudas emboîte le pas de son voisin, mais reste au milieu
de la chaussée. C'est moins dangereux. Il se tient dix mètres
derrière M. Labbé, qui longe les murs, pour s'abriter
de la pluie. Kachoudas se sent rassuré par la présence
du chapelier. Au café, il s'assied près du poêle,
un peu à l'écart. C'est naturel. Il n'est que Kachoudas.
Un étranger.
C'est ce soir-là, que le petit tailleur fait sa découverte.
Ce soir-là que, par hasard, ses yeux se posent sur le revers
de la jambe gauche du pantalon de M. Labbé. Parce qu'il y a
un petit point blanc. S'il n'avait pas été tailleur,
il ne s'en serait pas occupé. Mais il dut penser que c'était
un fil. Parce que les tailleurs ont l'habitude de retirer des fils.
S'il n'avait pas été aussi humble, il n'aurait pas eu
l'idée de se pencher. Mais Kachoudas saisit la chose blanche
qui s'est glissée dans le revers et qui n'est pas un fil, mais
un minuscule morceau de papier. Au lieu de jeter le bout de papier
par terre, il le tend au chapelier et murmure : Excusez-moi
Car il s'excuse toujours. Les Kachoudas se sont toujours excusés.
Il y a des siècles que, transportés comme des colis
d'Arménie à Smyrne ou en Syrie, ils ont pris cette prudente
habitude.
Le regard de Kachoudas croise alors celui de M. Labbé ; et
le tailleur sent son corps se figer. Un frisson extrêmement
désagréable traverse sa nuque de part en part. Le chapelier
prend le bout de papier, le triture entre ses doigts et en fait une
boulette guère plus grosse qu'une tête d'épingle
:
Merci, Kachoudas.
Le petit tailleur reste sur sa chaise. Il a froid et chaud. Il pourrait
claquer des dents. Il a peur. Car il a compris. Il a la certitude
que c'est LUI, M. Labbé, l'auteur des quatre assassinats perpétrés
contre des femmes dans la soixantaine, au cours de ces quinze derniers
jours. Ce morceau de papier dans son revers, ce confetti avec un n
et un t, n'en est-il pas la preuve ? N'est-ce pas avec des morceaux
de papier imprimé que l'étrangleur annonce ses crimes
à l'avance, par des billets anonymes adressés au «
Courrier de la Loire ». Il a la certitude, aussi, que la prime
de 20'000 francs qui récompensera celui ou celle qui permettra
l'arrestation du tueur est pour lui, Kachoudas, le petit tailleur,
qui aurait bien besoin de cette somme pour nourrir sa famille de huit
enfants (bientôt neuf !).
Kachoudas ne bouge pas. Il a envie de crier la vérité,
de téléphoner à la police. Mais tout ce qu'il
peut faire, c'est commander un deuxième verre de blanc, puis
un autre, et encore un autre. Jusqu'à ce que l'alcool le soule
et apaise son esprit en ébullition. Il n'ose même pas
quitter le Café de la paix.
Le petit tailleur évalue ses chances d'échapper au chapelier
et de parler au commissaire envoyé de Paris pour élucider
l'affaire de l'étrangleur. Mais il a peur de M. Labbé,
et peur de la police aussi. Il croit trouver une solution quand le
commissaire Micou lui commande la confection urgente d'un costume.
Il pourra faire sa révélation au moment de l'essayage.
Lorsque M. Labbé paie ses consommations, Kachoudas l'imite
et sort juste derrière lui. De manière à l'avoir
à l'il et éviter une éventuelle embuscade.
Le chapelier se dirige vers la rue des Prémontrés, puis
la dépasse. Le tailleur ose à peine le suivre : il se
voit déjà emmené en dehors de la ville pour être
tué.
Mais ce ne sera pas lui, la victime. Kachoudas va assister au cinquième
assassinat de M. Labbé, qui étrangle une vieille demoiselle
au moment où elle s'apprêtait à rentrer chez elle.
Le tailleur s'enfuit. Est-ce par hasard qu'il se retrouve devant le
poste de police ou avait-il vraiment l'intention d'y aller ? Une voix,
derrière lui, l'en dissuadera :
Vous auriez tort, monsieur Kachoudas
Quand le tailleur se retourne, M. Labbé a disparu. Il rentre
tranquillement chez lui, comme si de rien n'était. Kachoudas
n'ira pas voir la police, pas plus qu'il ne parlera au commissaire
le lendemain, lorsqu'il viendra essayer son nouveau costume.
Le soir, au Café de la paix, Kachoudas boit son vin blanc.
M. Labbé fait une partie de cartes avec le docteur, l'agent
d'assurances et l'épicier. Il lui adresse un sourire. Un sourire
sans arrière-pensée, comme s'ils étaient devenus
des amis. Alors le petit tailleur comprend que cela fait plaisir au
chapelier d'avoir un témoin, quelqu'un qui sait, qui l'a vu
à l'uvre, qui a compris qu'il n'agit pas par hasard et
que ses crimes ont un sens. Quelqu'un pour l'admirer, en somme !
Kachoudas lui rend son sourire, un peu contraint il est vrai. Et puis
il se décide et commande un deuxième vin blanc. Un homme
qui va gagner 20'000 francs peut bien s'offrir deux verres de vin
blanc.
[NDLR : chapitre 4, soit le dénouement de
l'intrigue propre à la nouvelle Le petit tailleur et le
chapelier.]
Auparavant, Kachoudas doit vérifier une hypothèse qui
lui est venue en parcourant la liste des victimes qui se trouvent
être toutes d'anciennes compagnes de classe de l'épouse
de M. Labbé, cette Mathilde impotente qu'on ne voit jamais
et que le chapelier est seul à approcher. Pour cela, le tailleur
se rend au couvent de l'Immaculée-Conception et rencontre Mère
Sainte-Ursule, qui lui confirme ses déductions.
Pour Kachoudas, tout est clair. En plus, il vient de sauver la vie
de Mère Sainte-Ursule, l'ex-future sixième et avant-dernière
victime du chapelier. Car M. Labbé a commencé par tuer
sa femme, avant de supprimer une à une ses amies et éviter
ainsi la traditionnelle visite annuelle qu'elles font à l'infirme.
Sans ces crimes, comment le chapelier aurait-il pu cacher la disparition
de Mathilde ?
Mais en rentrant chez chez lui, après sa visite au couvent,
le petit tailleur se rend compte qu'il arrive trop tard : la police
est dans la maison de M. Labbé, que sa bonne vient de dénoncer
après avoir compris qu'il avait tué son épouse.
C'est la bonne qui empochera la récompense. Au grand désespoir
de Kachoudas.
M. Labbé est là, lui aussi. Calme et digne, l'air un
peu absent, menottes aux poignets. Il répond évasivement
aux questions que lui pose le commissaire Micou. A un moment son regard
croise celui de Kachoudas, un peu comme s'il le prenait à témoin.
Si bien que le tailleur rougit. Il a honte de cette sorte d'intimité
qui s'est établie entre eux.
A l'étage, dans la chambre à coucher, derrière
le rideau qui masque la fenêtre, on enlève la tête
de bois que le chapelier déplaçait chaque jour, comme
si sa femme passait une partie de son temps à regarder dehors.
Quant au corps de Mathilde, on le retrouverait probablement enterré
dans le jardin ou dans la cave.
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